Cinémas d'hier... aujourd'hui - Les cinémas patrimoniaux
Publié: mars 2015
Comme il est agréable d'aller au cinéma lors d'une fin de
semaine pluvieuse ou froide! Synonyme de premières rencontres
embarrassantes et de maïs soufflé hors de prix, la sortie au cinéma
pour aller voir le plus récent film hollywoodien est un passe-temps
populaire au Canada depuis des décennies. Malgré la domination du
marché par les complexes de salles de grande envergure depuis les
dernières années, le vieux cinéma délabré demeure une destination
populaire pour certains cinéphiles. Il y a quelque chose
d'étrangement charmant à se trouver dans un établissement qui a
diverti des générations pendant si longtemps. Peut-être s'agit-il
des vieux sièges grinçants, mais curieusement confortables? Ou du
sentiment que l'on ressent en se demandant quelles vedettes
d'Hollywood ont bien pu briller sur le grand écran il y a
longtemps? Quoi qu'il en soit, les cinémas patrimoniaux ont joué un
rôle important dans la préservation d'une culture unique aux
municipalités.
Quoi de mieux qu'un cinéma? Eh bien, deux cinémas
situés dans le même édifice! Les
théâtres Elgin et Winter Garden (gauche), à Toronto, demeurent
le dernier exemple intact de « palais » du cinéma au
Canada. Conçu par Thomas Lamb en 1913-1914, cette véritable
institution de Toronto comprend deux salles superposées, le théâtre
Winter Gardens à l'étage supérieur et le théâtre Elgin au
rez-de-chaussée. Le théâtre Winter Gardens était si grandiose qu'il
pouvait accueillir jusqu'à 33 000 personnes chaque
soir! Le décor atmosphérique de la salle comprenait des motifs
représentant des sarments de vigne et des feuilles de hêtre ainsi
que des meubles et des murs décorés de scènes de jardin. Le lieu
offrait une ambiance où les clients pouvaient vraiment s'évader et
oublier leur routine quotidienne. Le théâtre Winter Gardens était
certainement le plus exubérant des salles jumelles, mais la vie qui
l'animait s'est éteinte lorsque la salle a fermé ses portes en
1928. Les lieux sont alors demeurés inoccupés pendant un quart de
siècle.
Le théâtre Elgin, au rez-de-chaussée, est quant à
lui demeuré fonctionnel et a évolué au fil des décennies pour
s'adapter aux changements de l'industrie cinématographique. D'un
décor de style néorenaissance, le théâtre présentait des motifs,
dorures et scagliolas classiques. Ouvert en 1913, le théâtre
Elgin a subi de nombreuses rénovations au cours de sa longue
histoire, la plus importante ayant été la conversion de la salle en
un cinéma à écran large en 1960. En outre, pour le client moyen,
l'entrée au théâtre Elgin, où un billet coûtait dix sous,
était beaucoup plus abordable qu'au Winter Gardens, où les billets
coûtaient de 25 à 50 sous. Malgré leurs différences, les deux
théâtres ont rouvert leurs portes dans les années 1980, au terme
d'un projet de restauration pour lequel le gouvernement de
l'Ontario a investi 8,5 millions de dollars.
Le théâtre Vogue (gauche) est une véritable
icône du divertissement du centre-ville de Vancouver depuis les
années 1940. Il fait partie du « Theatre Row » de la rue
Granville et représente bien l'architecture moderne canadienne.
Parmi les caractéristiques dominantes de ce style architectural, on
trouve les murs de béton texturé, les panneaux de Vitrilux et de
terrazzo, les piliers texturés en terre cuite, les écrans en fer
forgé et les meneaux en acier inoxydable. Tandis que les théâtres
Elgin et Winter Gardens de Toronto ont une architecture
esthétiquement plaisante, on a choisi pour le théâtre Vogue des
caractéristiques qui permettaient d'abord d'améliorer l'expérience
des cinéphiles. Les murs incurvés amélioraient l'acoustique dans le
bâtiment et l'éclairage modulé conférait au théâtre une atmosphère
particulière. Le Vogue ne servait pas uniquement à présenter des
films, mais aussi des pièces de théâtre sur scène. C'est pourquoi
on y trouve un espace ouvert pouvant accueillir un orchestre. Avec
ses 1 347 places, le Vogue était un théâtre relativement
petit, mais les sièges y étaient beaucoup plus larges qu'ailleurs,
ce qui permettait aux clients d'apprécier la projection
confortablement, dans un climat intime.
Le Cinéma Palace (droite), à
Calgary, est un magnifique bâtiment de quatre étages de style
édouardien classique. Construit en 1921, il est connu pour avoir
été l'un des rares « palais » du cinéma à présenter des
films muets. Parmi les principales caractéristiques du bâtiment
construit par les frères Allen, on remarque la façade de brique
rouge, les fenêtres cintrées, les murs latéraux en angle aigu vers
la scène, les escaliers en marbre et les reliefs moulés en plâtre
décorant les balcons. Au fil du temps, le Cinéma Palace est devenu
connu pour présenter toutes sortes de films et d'activités au
public. Les projections du samedi matin étaient principalement
destinées aux élèves, tandis que les matinées des jours de semaine
visaient à attirer les femmes. Le membre le plus connu du Cinéma
Palace était sans doute William Aberhart, surnommé « Bible
Bill », qui animait devant un auditoire des émissions de radio
en direct sur des thèmes religieux (il est ensuite devenu le
premier ministre de l'Alberta de 1935 à 1940). Des années 1940 aux
années 1950, la fréquentation du cinéma a augmenté grâce à la
visite de vedettes comme Lena Horne et Jan Pearce. C'est ainsi que
le Cinéma Palace est devenu l'un des lieux de divertissement public
les plus prospères au Canada.
Depuis des décennies, les écrans des vieux cinémas nous font
vivre la frénésie d'Hollywood. En plus de divertir, ces
institutions maintiennent un lien entre le passé et le présent dans
les municipalités. En outre, l'architecture recherchée des cinémas
historiques contribue à améliorer l'expérience des cinéphiles et à
créer une atmosphère particulière que l'on retrouve rarement dans
les complexes de salles modernes.