Les paysages culturels du Canada
Les paysages culturels du Canada : voyage
au cœur de l'interaction entre l'homme et son environnement
En consultant le Registre canadien des lieux patrimoniaux
(RCLP), vous découvrirez des endroits désignés comme
arrondissements historiques ou paysages culturels, qui comprennent
souvent plusieurs caractéristiques naturelles ou faites par
l'homme. Cet article présente une brève introduction et un aperçu
des paysages culturels au Canada. Pour en savoir plus, consultez la
liste de liens à la fin du document.
Au cours des trois dernières décennies, le concept de paysage
culturel a été adopté dans les domaines de la géographie
culturelle, de l'architecture, de l'urbanisme, de la recherche
historique et d'autres professions connexes afin de comprendre les
relations entre les humains et la nature. Le domaine de la
conservation du patrimoine ne s'est pas arrêté seulement à cette
interaction, mais a aussi adopté le concept de paysage culturel
comme un outil pratique pour gérer de façon proactive et
respectueuse les paysages d'importance historique qui sont
d'intérêt pour des groupes, des cultures ou des populations en
particulier. La valeur de cette méthode de protection du caractère
d'un paysage donné repose sur la possibilité d'intégrer de
multiples points de vue sur un lieu, de rassembler divers
intervenants ainsi que de reconnaître les meilleures méthodes
traditionnelles d'intendance pour promouvoir les pratiques durables
d'utilisation du territoire.
Il n'existe aucune définition universelle du concept de paysage
culturel. Toutefois, en général, l'application de ce concept repose
sur deux éléments propres au lieu : sa situation géographique
(paysage), c'est-à-dire un endroit véritable et tangible, ainsi que
les impressions, les croyances et les rituels (culture) qui y sont
associés. La taille des paysages culturels peut varier, allant
d'une rue à une ville entière, en passant par un corridor de
migration. Par la désignation d'un paysage culturel, on reconnaît
la relation complexe que les humains ont eue, et continuent
d'avoir, avec les endroits qu'ils créent et occupent.
Le
lieu historique national du Canada des Forges-du-Saint-Maurice
près de Trois-Rivières, au Québec, est l'un de ces complexes
reconnus comme paysage culturel en raison de son établissement et
de son évolution subséquente en tant que premier site industriel établi dans un
environnement naturel bien défini. Les forges ont été construites
sous le régime français, en 1730, pour produire le fer nécessaire à
la colonie française. Même si l'activité d'origine de l'endroit a
pris fin depuis belle lurette, les éléments physiques et naturels
encore existants démontrent néanmoins la façon dont les humains se
sont adaptés à la topographie de la région.
Contrairement au paysage des forges du Saint-Maurice, qui est en
fait constitué de vestiges, le paysage culturel du village de Tilting, sur l'île Fogo, à Terre Neuve et
Labrador, est encore actif et en constante évolution. Ce village a
été reconnu parce qu'il représente les établissements irlandais
typiques du XIXe siècle, ainsi que l'utilisation continue des éléments traditionnels du paysage façonnés par
l'homme (jardins, granges et chemins) et des éléments naturels
(havre et rivage, topographie accidentée et en pente, mares, etc.).
Tilting (un lieu) est donc un paysage culturel où les relations
entre les activités humaines (ou rituels) associées à une tradition
en particulier, dans ce cas l'industrie de la pêche maritime, sont
encore bien présentes et bien comprises par les résidents.
Les paysages culturels peuvent aussi être associés à un endroit
où la présence de vestiges matériels est minime, voire
imperceptible. Au Canada, ce type de lieu patrimonial est
généralement, mais pas exclusivement, lié au patrimoine autochtone.
Parcs Canada, l'organisme fédéral responsable de la conservation du
patrimoine, a proposé qu'un paysage culturel autochtone soit un
endroit auquel un Autochtone accorde une signification particulière
« en raison du lien persistant et complexe entretenu avec le
territoire. Le paysage exprime l'unité du groupe avec le milieu
naturel et les valeurs spirituelles qui y sont rattachées. Il
incarne la connaissance traditionnelle des esprits, des lieux, des
utilisations du territoire et de l'écologie. » Le
lieu historique national du Canada du
Passage-de-Caribous-en-Automne, à Baker Lake, au Nunavut, est l'un de ces
lieux où, pendant des générations, les Inuits ont utilisé les
terres pour la chasse saisonnière. Les croyances et les récits de la
tradition orale liés à ce territoire font maintenant tous deux
partie de la vision du monde des Inuits. De fait, la reconnaissance
et l'appréciation de ces coutumes et de ces croyances
traditionnelles liées au territoire peuvent éclairer les décisions
futures qui auront une incidence sur la conservation de la valeur
de ces endroits.
Le concept de paysage culturel appuie non seulement la façon
dont nous prenons soin de notre environnement culturel, mais
contribue aussi à la compréhension de la formation des identités
locales et nationales. Le
lieu historique national du Canada de
l'Arrondissement-Rural-Historique-de-Grand-Pré, en Nouvelle-Écosse, est l'un de ces endroits
dont l'importance culturelle s'étend au-delà de ses frontières
physiques. Reconnu comme le cœur de la culture acadienne, Grand-Pré
est non seulement un endroit, mais aussi une idée. Les Acadiens
dont les ancêtres ont été déportés de la Nouvelle Écosse en 1755
entretiennent des liens très forts avec la région en raison de son
association symbolique avec leur identité acadienne; nombreux sont
ceux qui entreprennent d'ailleurs un pèlerinage pour se rapprocher
de leurs racines culturelles. L'esprit acadien continue de
s'exprimer dans les arts et la littérature de cette culture, et se
manifeste dans le paysage de Grand-Pré par des souvenirs tangibles.
En combinant des attributs physiques et intangibles, les
paysages culturels nous permettent de reconnaître l'interaction
entre les humains et leur environnement, tout en fournissant un
cadre pour conserver l'esprit de l'endroit. Bien qu'il ne fasse
aucun doute que certains endroits soient en constante évolution, il
est important, pour préserver le caractère des endroits que nous
chérissons, de d'abord comprendre ce qui en fait des endroits
d'intérêt, puis d'élaborer un plan de gestion pour les ressources
naturelles et culturelles qui contribuera aux valeurs associées à
l'endroit.